Travail aérien – Dérogations aux hauteurs de survol des agglomérations

Comme annoncé dans la réponse à la consultation sur le projet d’arrêté ULM que nous adressons à la DSAC, nous avons souhaité aborder la question des dérogations de survol aux fins d’ouverture d’une réflexion en vue d’une révision de l’instruction du 25 mai 2005, qui exclut par principe les ULM du bénéfice des dérogations de survol.

Nous avons adressé le courrier suivant à la DSAC :

A l’attention de Monsieur Olivier OUTTIER, directeur de la Direction technique coopération européenne et règlementation de la sécurité à la DSAC.

Objet : Questions relatives aux dérogations de survol des agglomérations

Monsieur le Directeur,

Comme annoncé dans la réponse à la consultation sur le projet d’arrêté ULM que nous vous adressons, nous souhaitons aborder la question des dérogations de survol aux fins d’ouverture d’une réflexion en vue d’une révision de l’instruction du 25 mai 2005, qui exclut par principe les ULM du bénéfice des dérogations de survol.

À cet effet, nous vous transmettons en annexe un document regroupant l’ensemble de nos constatations, réflexions et propositions sur le sujet, dans l’espoir de l’ouverture prochaine d’un dialogue constructif sur ce dernier.

Nous demeurons à votre disposition dans cette perspective, et dans l’attente, vous prions de recevoir, Monsieur le directeur, nos très cordiales salutations.

Le président, Serge Marolle.

 

Travail aérien – Dérogations aux hauteurs de survol des agglomérations

La réglementation peut-elle continuer à favoriser l’usage des appareils les plus anciens et les plus polluants en écartant les plus récents, plus silencieux, moins polluants, plus économiques et apportant un niveau de sécurité égal ou supérieur ?

La réglementation en France impose les hauteurs de survol les plus élevées d’Europe, 1 500 mètres sur les agglomérations importantes, là où la norme dans tous les pays Européens se limite à un plancher de 300 mètres avec obligation pour le CDB de se placer à une hauteur où il ne met pas les tiers en danger en cas de panne.

Ces hauteurs sont liées au choix fait par la France : transposer mot pour mot dans SERA au titre des exceptions nationales, les contraintes de l’arrêté de 1957. Cet arrêté créé il y a 66 ans était motivé en particulier par le niveau sonore des appareils de l’époque et, on peut l’imaginer également, du fait de leurs performances moindres en termes de fiabilité moteur et de finesse en cas de panne.

Ces hauteurs de survol ne permettent pas d’effectuer nombre de missions de travail aérien sur les agglomérations qui pour la plupart sont des missions de photographies aériennes au profit le plus souvent de ces mêmes agglomérations, et souvent d’intérêt public (gestion du bâti et des réseaux notamment).

De ce fait, la réglementation prévoit depuis 1957 des possibilités de dérogation à ces hauteurs, dans un cadre précis qui a pour but légitime de garantir la sécurité des tiers au sol et de limiter les nuisances sonores.

L’instruction du 25 mai 2005 rappelle ces conditions de dérogation aux hauteurs de survol sur les agglomérations. Elle les réserve exclusivement aux appareils certifiés et pour ce qui est des ULM, uniquement aux ULM de classe 5 dont la compatibilité pour ce type de travaux aériens est très limitée et dont le nombre d’appareils en circulation n’est qu’anecdotique.

Ainsi, en l’état 99,999 % des missions nécessitant une hauteur de vol dérogatoire sur une agglomération ne sont, et ne peuvent être réalisées, que par des appareils certifiés.

Pour des raisons qu’il serait long de développer ici, il s’avère que les appareils utilisés par les principaux opérateurs français pour réaliser ces missions dérogatoires sont de plus en plus anciens comparés aux flottes d’entreprises similaires dans le reste des pays européens.

Une consultation du registre officiel des immatriculations permet de constater que la flotte d’appareils utilisés par les opérateurs français dépasse aujourd’hui un âge moyen supérieur à 40 ans, plusieurs affichant même plus de 50 ans depuis leur sortie d’usine… (voir détail ci-après).

 

 

Tous ces appareils dont la conception est encore plus ancienne que leur année de sortie d’usine, sont et de loin les plus bruyants, les plus énergivores et par conséquent les plus polluants du marché (consommation moyenne de l’ordre de 100 litres/heure).

Depuis plusieurs années des appareils de nouvelle génération bien plus silencieux et de 3 à 10 fois moins polluants ont fait leurs preuves pour réaliser des missions similaires en apportant un niveau de sécurité identique ou supérieur.

Nombre d’entre eux relèvent de la catégorie ULM 3 axes et sont exclus des dérogations de hauteur de survol, leur seul statut d’ULM ou l’absence de certification ne justifie pas en soi leur exclusion de ces dérogations puisque les ULM de classe 5 sont autorisés dans l’instruction de 2005.

Les ULM de classe 3 dernière génération, en particulier quand ils sont mis en œuvre dans un cadre professionnel ont démontré qu’ils remplissent parfaitement des missions de travail aérien, et qu’ils apportent des garanties de sécurité identiques, voire supérieures aux appareils certifiés :

  • moins d’énergie cinétique : 3 à 5 fois moins de masse ;
  • 10 à 20 fois moins de carburant embarqué ;
  • motorisation récente reconnue comme très fiable au point d’équiper de plus en plus l’aviation certifiée (Rotax 912) également bien plus silencieuse et moins polluante ;
  • finesse souvent plus élevée permettant de s’éloigner sans difficulté des zones urbaines dans l’hypothèse d’une panne moteur et vitesse minimale de vol plus faible facilitant d’autant plus un atterrissage en campagne le cas échéant ;
  • conception, construction et suivi de la navigabilité par des constructeurs de très haut niveau produisant également des appareils certifiés (ex. Pipistrel, Aerospool, etc.) ;
  • technologies récentes de conception et de fabrication intégrant des éléments de sécurité supplémentaires tant pour l’équipage que pour les tiers au sol comme le parachute de structure.

Les chiffres en termes de sécurité pour cette catégorie d’activité sont limpides : ce sont les appareils certifiés qui sont et de loin, les plus accidentogènes, pas les ULM.

Un recensement des accidents survenus dans la catégorie « Type d’exploitation : Photographies aériennes » par le Bureau enquêtes et analyses ces 25 dernières années fait ressortir un total de 15 accidents mettant en cause 17 appareils. On y retrouve :

  • 12 appareils certifiés, (8 hélicoptères et 4 avions), (70 % des cas) ;
  • 3 ULM (17 % des cas) ;
  • 2 drones (13 % des cas).

Si l’on fait étendre cette étude sur une base plus large en incluant en type d’exploitation à la fois « prises de vues aériennes » ET « autres exploitations spécialisées ou activités particulières » : seuls 5 ULM ressortent des 98 événements recensés par le BEA.

Laisser la réglementation en l’état réservant par le fait ces activités aux appareils certifiés sans permettre l’usage d’appareils plus modernes et plus vertueux n’est plus cohérent aujourd’hui :

  • la préoccupation des autorités, des donneurs d’ordres, et du grand public est devenue très importante en ce qui concerne le développement durable, de plus en plus de marchés publics intègrent le bilan carbone de l’opération dans les critères d’attribution ;
  • l’aviation est engagée à marche forcée dans un processus de décarbonation et doit pouvoir montrer qu’elle réalise des progrès en ce sens ;
  • le législateur exclut de plus en plus les automobiles qui atteignent 15 à 20 ans d’âge et consomment 10 litres aux 100 km des agglomérations par le biais des ZFE. Est-il dès lors encore cohérent que les autorités continuent à délivrer des dérogations à des avions fabriqués il y a 40 ou 50 ans qui brûlent de l’ordre de 4 à 10 fois plus de carburant au kilomètre parcouru pour survoler ces mêmes agglomérations à basse altitude quand des solutions alternatives existent ?
  • la situation très concurrentielle de ces marchés pousse les opérateurs vers les appareils certifiés les plus anciens qui sont les moins chers à l’achat. Le dernier acquis ces derniers mois par un opérateur est un Cessna 177 de 48 ans d’âge… Si la réglementation reste en l’état, rien ne motivera les opérateurs à renouveler leurs flottes par des appareils plus vertueux, faudra-t-il demain voir des appareils âgés de 60 ans ou 70 ans survoler les agglomérations sous dérogation à basse altitude et jusqu’à quelle limite ?

Nous souhaitons dès lors qu’une possibilité de dérogation aux hauteurs de survol soit étudiée pour les ULM mis en œuvre dans le cadre d’activités particulières.

Elle pourrait permettre de passer de 1 500 à 750 mètres sur les plus grandes agglomérations (tache orange de la 500 000) et de 1 000 à 500 mètres dans les agglomérations moyennes (taches jaunes de la 500 000). En conservant bien sûr comme c’est le cas dans les dérogations actuelles l’obligation pour le CDB de maintenir en permanence une hauteur minimale au-dessus de ces planchers permettant à tout moment de sortir de l’agglomération en cas de panne ceci en fonction des performances de l’appareil utilisé et des conditions de vol du jour.

À ces hauteurs, les 3 axes modernes sont inaudibles du sol, leur finesse, dans le cas d’une panne moteur complète au centre de l’agglomération et en appliquant une marge de sécurité de 20 % permet non seulement de sortir de l’agglomération sans difficulté et même la plupart du temps d’atterrir avec de la marge sur l’aérodrome ou l’aéroport qui jouxte nombre d’agglomérations tache orange sans même avoir à utiliser de zone de recueil en campagne.

Exemples : Agglomération tache orange de la 500 000 :

Distance moyenne à parcourir pour sortir de l’agglomération dans l’hypothèse d’une panne moteur totale en plein centre de l’agglomération : 4 à 5 km pour la quasi-totalité des taches orange. (Paris & RP peuvent être exclus car les planchers des classes A excluent par le fait d’office les ULM).

Distance de plané ULM WT 9 : Finesse de 10 moins coef de sécurité de 20 % à 750 mètres : 6 km

Distance de plané ULM Alfa Trainer : finesse de 17 moins coef de sécurité de 20 % à 750 mètres : 10,2 km

Exemple 2 : Agglomération tache jaune de la 500 000 :

Distance moyenne à parcourir pour sortir de l’agglomération dans l’hypothèse d’une panne moteur totale en plein centre de l’agglomération pour la quasi-totalité des taches jaunes de la 500 000 : 1 à 2,5 km.

Distance de plané ULM WT 9 finesse de 10 moins coef de sécurité de 20 % à 500 mètres : 4 kilomètres.

Distance de plané ULM Alfa Trainer : finesse de 17 moins coef de sécurité de 20 % à 500 mètres : 6,8 km.

 

 

 

 

 

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